Jacques Bouveresse fut un philosophe en tout point singulier : d’abord connu comme introducteur en France d’une des pensées les plus importantes de l’histoire de la philosophie, celle de Wittgenstein, il a développé une oeuvre qui témoignait d’un tempérament profondément indépendant vis-à-vis des modes intellectuelles, souvent polémique par rapport aux aveuglements idéologiques, aux facilités rhétoriques ou aux faiblesses argumentatives de ce qui était présenté comme la Théorie française.
Jean-Claude
Monod a entretenu avec Jacques Bouveresse une longue conversation. La
remémoration de ces discussions lui permet de livrer un portrait
sensible de l’auteur du Mythe de l’intériorité, en revenant sur ses
points d’ancrage et ses combats : son inscription dans la tradition
française d’un certain rationalisme ; son ouverture à la philosophie
analytique aussi bien qu’à la littérature de langue allemande ; sa
critique du journalisme, nourrie par l’exemple du satiriste viennois,
Karl Kraus ; sa complicité avec Pierre Bourdieu, qui articulait
autrement engagement et rigueur scientifique ; son attachement à l’idée
de vérité objective. C’est tout un paysage intellectuel qui est ainsi
parcouru, celui de la philosophie française des cinquante dernières
années, que Jacques Bouveresse a contribué
à transformer en profondeur.
Jean-Claude Monod est directeur de recherche au CNRS. Spécialiste de philosophie politique et de philosophie allemande, il est notamment l’auteur de Qu’est-ce qu’un chef en démocratie ? (Seuil, 2012 ; Points, 2017) et L’Art de ne pas être trop gouverné (Seuil, 2019).
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